L’Antarctique une vaste histoire de conquêtes.
Terra Incognita, au Musée des Confluences de Lyon

Audrey Rivollier, décembre 2023

Photographies d'Audrey Rivollier, exposition « Terra Incognita », Musée des Confluences, octobre 2023.

Le musée des Confluences, en tant que musée d’histoire naturelle, d’anthropologie, des sociétés et des civilisations est, très riche par les expositions qu’il présente. Les diverses installations, auxquelles le public a accès, prônent un savoir-faire tant historique que scientifique. La structure s’est engagée à proposer de multiples thématiques sur les origines du monde d’un point de vue animal comme humain avec des inventions techniques. Ce bâtiment au style déconstructiviste situé dans le deuxième arrondissement de Lyon à la rencontre du Rhône et de la Saône, se compose de deux étages d’expositions. Le premier étant pour les expositions temporaires et le second pour les expositions permanentes. C’est donc sur l’exposition Terra Incognita, rendez-vous au bout du monde, qui est la première proposition lorsque l’on arrive au premier étage, que nous nous arrêterons. Terra Incognita suscite une certaine attention et curiosité dès son emplacement, puisqu’elle se situe à part des autres expositions temporaires.

La promesse du réalisateur Luc Jacquet est de plonger le spectateur dans les traces des explorations par un voyage allant de la Patagonie jusqu’au pôle Sud. Un témoignage des expéditions de l’Antarctique comme une aventure ouverte à tous virtuellement, sur des terres polaires qui sont en réalité difficiles d’accès.

Le dispositif scénographique se compose de deux espaces, la « chambre des cartes », puis la salle du « bout du monde ». L’entrée réalisée par des draps noirs, ne laissant aucune possibilité de voir ce qui se cache derrière, nous plonge dans cet univers. Il faut suivre un couloir, situé à gauche, délimité par deux cartes de l’Antarctique avant d’arriver sur une télévision diffusant l’histoire de la conquête du territoire. Le parcours se poursuit sur un autre petit couloir avec des icebergs flottant au plafond qui laisse place à une grande pièce carrée. C’est ici que le spectateur est plongé dans un cadre immersif aux divers aspects visuels et sonores.

Cette pièce est découpée de façon assez nouvelle et originale puisque le spectateur est directement invité à regarder un gros bloc, un carré servant de toile de projection d’images sur ses quatre faces. Plusieurs toiles noires sont disposées de part et d’autre des murs soit au nombre de quatre permettant de projeter des textes, mais aussi de nouvelles images, différentes de celles au centre de l’espace.

Lorsque l’on arrive dans cette exposition, la vidéo située dans le premier couloir n’a pas de son puisque celui entendu provient de la seconde salle. L’objectif de cette vidéo projetée sur télévision est de comprendre comment l’Antarctique était placée sur les cartes alors même qu’elle n’avait pas été découverte. Ainsi, le court film se termine par les expéditions du 19e siècle au 20e siècle avec La course au pôle Sud (livre de Sylvie Baussier édition Oskar, 2020). Une course de deux équipes en simultanées pour rejoindre les terres de ce « continent blanc », une équipe norvégienne celle de Roald Amundsen et l’équipe britannique de Robert Falcon Scott. Les deux équipes sont arrivées avec un mois de décalage dans le pôle Sud, mais la seconde équipe n’en n’est pas repartie vivante. Cette courte histoire vidéographique permet de comprendre le contexte et l’histoire de notre monde. Cependant, ce couloir, adjacent à la pièce carrée, ne permet pas d’obstruer les effets sonores qui se dégagent dans toute la salle. En effet, des enregistrements de bruits, de sons, que certains explorateurs ont pu enregistrer, sont diffusés. Que ce soient des animaux (phoques et pingouins), de l’eau, du vent sur les hautes herbes, tous sont retracés et immortalisés.

Finalement, tout est pensé pour que le spectateur soit immergé et pour qu’il ait la possibilité de lui aussi faire ce voyage. Les ambiances sonores sont accompagnées ou traduites par les quatre toiles de projections avec des images des animaux en question et des paysages tous aussi spectaculaires que divers et variés. Ces images sont en noir est blanc, elles ressortent donc mieux grâce à la luminosité des projecteurs, dans cette salle plongée dans le noir. Le spectateur est placé tout autour, contre les murs, sur des blocs carrés en bois. On peut y voir une volonté de ne pas surcharger la pièce d’éléments qui ne servent pas à l’exploration projetée ou bien, un écho aux icebergs des images, mais aussi ceux qui sont accrochés au plafond, flottant à l’entrée de ce grand espace. Ces blocs de glaçons, espacés les uns des autres, témoignent-ils du réchauffement climatique que nous connaissons depuis quelques années ?

Plusieurs textes défilent, apparaissent et disparaissent de façon assez fluide, donnant un appui aux images. Il s’agit de textes écrits par des scientifiques comme Charles Darwin, un ornithologue William Henry Hudson, des écrivains comme Stefan Zweig, Luis Sepulveda, Nicolas Bouvier, Francisco Coloane, Michel Le Bris. Mais aussi et surtout des passionnés et explorateurs, navigateurs polaires, tels que James Cook ou Sir Ernest Shackleton. Ce dispositif, qui réunit de nombreux discours sur les aventures encourues, manifeste une volonté de les partager, de donner à voir ces découvertes.

Dans cette ambiance apaisante entre sons, images et mots, le visiteur est invité à fermer les yeux et se sentir pleinement envahi par les sensations proposées. Mais que faire dans un espace réduit au minimum d’éléments et au maximum de sensations sonores comme visuelles ? Que faut-il regarder ou écouter en premier ? Est-il possible de tous lire et de tout voir ? L’expérience immersive n’a qu’une seule limite celle du temps.

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