Brossard Adrienne, reconversion réussie en médiathèque
Gaëlle Marion, janvier 2025
Cela fait maintenant dix ans qu’Adrienne Brossard s’épanouit au sein de la médiathèque de Tréfilerie à Saint-Etienne. Cependant, son parcours n’a rien de classique. Adrienne n’a pas fait d’études dans ce sens et s’est retrouvée, par heureuse coïncidence, à l’intersection des œuvres littéraires, cinématographiques, musicales et du public.
Qu’est-ce qui vous a amené à travailler dans ce milieu ?
Je dirais que c’est avant tout le hasard. Je travaillais dans le portage de repas au sein du CCAS [Centre Communal d’Action Sociale – nda], et le service a fermé. On a été obligé de se rapprocher d’autres services complètement différents. J’ai alors demandé à avoir un poste qui soit évolutif et surtout polyvalent. C’était normal car je ne faisais pas seulement de la distribution de repas. On avait une surveillance active des personnes âgées, si on voyait que leur état se dégradaient, on faisait remonter les informations. C’est ainsi qu’on m’a appelée un premier avril pour me proposer de travailler à la médiathèque de Tréfilerie. Et ce n’était pas un poisson [rires] ! Je suis rentrée dans la filière culturelle comme ça.
Comment s’est passée votre intégration dans l’équipe malgré votre manque d’expérience ?
Je dois dire que je suis tombée sur une bonne équipe et que je suis quelqu’un qui s’intègre facilement. J’aime comprendre la façon de travailler des autres. C’est ce qui m’a aidée et permis de me faufiler dans cette filière. Mais, je pense qu’il faut être curieux de tout pour travailler là. Ce n’est vraiment pas fait pour les personnes qui aiment la sédentarité et la tranquillité. Il faut être disponible, agréable avec les lecteurs et pouvoir les renseigner. C’est pour cette raison que j’ai voulu m’intégrer dans les acquisitions de romans, parce que ça m’a permis de connaître le fonds [ensemble des documents disponibles – nda].
Avez-vous eu des doutes au début ?
Bien sûr que je me suis posée des questions. Au début, on se dit : « comment vas-tu faire ? », « est-ce que tu vas y arriver ? », parce que c’est complètement nouveau. Mais on n’est pas plus bête qu’un autre. On va forcément y arriver. Sur mes dix années dans ce milieu culturel, j’ai évolué tout le temps et je suis très contente d’être tombée dans cette filière. C’est le cas de le dire, quand on ne sait pas la veille pour le lendemain où on va atterrir, on a réellement la sensation de « tomber ». Je ne regrette absolument pas ce repositionnement. Aujourd’hui j’approche de la retraite et je vais terminer paisiblement ma seconde carrière de substitution.
Comment imaginiez-vous le travail en médiathèque, avant de le pratiquer ?
Des prêts et des retours, point [rires]. Je savais que le livre n’arrivait pas sur la banque de prêt comme ça. Il y a du travail en amont. Mais c’était très vague. Pour moi, il s’agissait principalement du prêt-retour, et aussi du classement. Mais je n’avais pas trop d’idée du fonctionnement et du travail de fond nécessaire pour faire tourner une médiathèque.
Pouvez-vous expliquer plus en détails en quoi consiste votre poste et ce qui fait sa diversité ?
Mes missions sont vraiment très multiples. Je fais de la réparation de livres, les offices [réunion pour discuter des livres à acquérir – nda] et des tris en librairie. Je vais aussi sur leur sites internet et je regarde les sorties littéraires. On fait aussi des animations. Là, on organise par exemple « les gueules noires du Polar ».
Les médiathèques proposent, comme son nom l’indique, plusieurs médias. Il y a évidemment des ouvrages littéraires, mais aussi de la documentation, des films, des CD audio et des revues.
Effectivement, cela demande de se diversifier et de connaître plusieurs fonds. Ce qu’on prête à nos lecteurs, ce n’est pas que du livre. Mais il faut savoir où on peut retirer les documents : là où je travaille nos collections sont réduites tandis que le site de Tarentaize, qui est la médiathèque centrale, a des fonds plus conséquents. C’est là où on peut trouver les pièces rares. Tout cela, ça s’apprend.
Y a-t-il des difficultés particulières liées à ces différents formats ?
Cela exige une polyvalence culturelle parce qu’il faut savoir toucher à tout. Avant, je lisais seulement certains auteurs et il y en avait énormément que je ne connaissais simplement pas. Maintenant, je n’en suis pas à tenir une librairie, attention [rires], mais mon travail m’a apporté de la connaissance. Si une personne est curieuse, tenace et qu'elle aime la polyvalence, je pense qu’il n’y a pas de problème pour intégrer un réseau culturel qu’est une médiathèque.
Que voulez-vous dire par « tenace » ?
J’entends par « tenace » le manque d’études dans cette spécificité. Il faut être tenace pour essayer de combler les lacunes qu’on a quand on rentre dans ce milieu. J’en ai passé des heures sur les écrans pour justement me cultiver et combler les points qui me faisait défaut. Tous les jours, je me dis : « Tiens ! Ça, tu ne savais pas ».
Quelle était votre rapport à la littérature avant votre prise de poste ?
Mes classiques, je les connaissais, mais en ce qui concerne le contemporain… je n’avais pas plus de culture que ça. J’étais aussi assez « documentaire », pas seulement écrits, j’aimais aussi les visionner. En revanche, j’aimais découvrir les choses et disons qu’en commençant ce travail j’ai pris le train en marche. J’ai perçu la littérature comme une montagne à escalader et je savais que la montée allait être raide. Mais j’ai grimpé. Je ne dis pas que je suis arrivée au sommet. Mais ça m’a permis de m’élever un petit peu et c’est que du bénéfice.
Lorsque l’on parle de littérature, on ne peut pas passer à côté de l’écriture. Est-ce que vous pratiquez cette activité ?
Avant j’écrivais beaucoup… C’est aussi pour ça que j’ai aimé travailler en médiathèque. J’avais des correspondants en Espagne, en Italie et j’écrivais de tout. J’étais toujours avec mon dictionnaire, puisqu’il n’y avait pas d’autres solutions à l’époque. Aujourd’hui, on prend moins le temps d’écrire.
Pour finir, il est difficile de ne pas vous poser cette question : comment organisez-vous votre bibliothèque personnelle ?
J’ai gardé une petite collection de livres que j’ai vraiment aimés. Je les mets par genre : romance, polar, fiction. J’en ai beaucoup donné et j’en ai vendu pas mal. Là, il m'en reste quelques-uns. Et puis, je suis à la médiathèque maintenant. Alors les garder, ça ne m’intéresse plus. Je prends, je le lis, je le rends. Ça n’encombre pas mes étagères et cela représente exactement ma façon de penser.